A Conques avec Pierre Soulages

Pierre Soulages. Vitraux de l’abbaye de Conques, 1987-1994

Entre 1987 et 1994, Pierre Soulages (décédé il y quelques jours à 102 ans) a réalisé les vitraux des 104 verrières de l’église abbatiale de Conques. Avec les usines de St Gobain, il recherche un matériau nouveau qui laisse largement pénétrer la lumière, tout en isolant de l’extérieur, pour préserver la clôture du sanctuaire. Il s’agit aussi de laisser à la pierre originelle son éclat d’antan. Soulages disait d’ailleurs qu’il s’agissait de « donner à voir l’architecture du XIème avec les moyens dont nous disposons au XXème siècle. ». Les bandes noires rythmant l’espace visent essentiellement à faire vibrer la lumière. L’originalité de l’œuvre tient aussi au fait que les vitraux sont lisibles autant de l’extérieur que de l’intérieur.

Je prends le temps de me disposer pour un temps de contemplation. Je me mets à l’écart, en choisissant le lieu où je peux quitter mon environnement quotidien pour descendre en moi-même. Je me marque du signe de la croix. J’invite mon imagination pour me transporter dans cette abbatiale du XIème, illuminée par ses vitraux. Je m’imagine, déambulant dans l’espace de cette église, et je m’arrête face à ces murs et ces voutes éclairés par trois vitraux.

Je contemple d’abord l’architecture, la pierre ocre utilisée par ces bâtisseurs du XIème siècle. Je médite sur le travail qu’a rendu possible la foi. Je rends grâce pour tous ces artisans qui nous laissent ce témoignage, qui nous ouvrent à la transcendance par la beauté. J’imagine le patient labeur des tailleurs de pierre, travaillant en équipe pour que les murs s’élèvent, promis à la stabilité dans la durée. Je vois aussi dans cette architecture le symbole de l’église, et de ses pierres vivantes qui traversent les siècles pour que la Bonne Nouvelle continue d’être annoncée.

Et moi, comment est-ce que je me situe, dans cette histoire de la foi, sur quels témoins est-ce que je m’appuie ?

Je m’arrête ensuite sur la lumière, laissant monter en moi des extraits de la Parole qui évoquent la lumière.

« Dieu dit : « Que la lumière soit. » Et la lumière fut. » (Ge, 1,3)

« Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ; et sur les habitants du pays de l’ombre, une lumière a resplendi. » (Is, 9,1)

« De nouveau, Jésus leur parla : « Moi, je suis la lumière du monde. Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, il aura la lumière de la vie. » (Jn, 8,12)

« Ta parole est la lumière de mes pas, la lampe de ma route. » (Ps 119, 105)

En ce temps de l’année, où l’obscurité se fait plus présente, je pense à mon besoin de lumière. Que permet-elle en moi ? Comment la Parole de Dieu se fait-elle lumière pour moi ? Marchant vers le temps de l’Avent, quelle place, dans ma vie, à la lumière du Christ ?

Je contemple maintenant les lignes noires qui strient la lumière des vitraux. A partir des barlotières, ces barres métalliques horizontales qui permettent de fixer les vitraux sur les ouvertures, Soulages dessine de multiples traits noirs. Je suis sensible à leur rythme, leur orientation…lignes parallèles, obliques plus ou moins marquées, descendantes, ou ascendantes. Je laisse mon regard passer d’un cadre à un autre, lentement…Autant de traces, peut-être, de tant de pèlerins, venus se recueillir dans cette abbatiale, autant de traces, peut-être, de mes états intérieurs, plats, descendants, ascendants…Je peux alors méditer sur le propre rythme de ma vie intérieure de ce jour.

        

Soulages, peintre du noir, de « l’outre noir » a toujours insisté pour souligner que le noir n’avait pour fin que de réfléchir la lumière. Comment, dans ma vie de ce jour, la lumière de Dieu se rend-elle présente 

Pour terminer, nous pouvons dire la prière du lucernaire, que chantent les communautés monastiques à l’office du soir.

Joyeuse lumière, splendeur éternelle du Père.
Saint et bienheureux Jésus Christ !
Venant au coucher du soleil
Contemplant la lumière du soir
Nous chantons le Père et le Fils,
Et le Saint Esprit de Dieu.
Nous Te chantons, Ressuscité,
Toi qui surgis des ténèbres du tombeau
Étoile du matin qui devance l’aurore
Dont l’éclat resplendit jusqu’au monde nouveau.
Reste avec nous, Seigneur,
Car déjà le jour baisse
Illumine nos yeux au soir de cette Pâques
Toi la lumière qui ne connaît pas de couchant.

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